POINT HEBDO-Droits de douane et accords commerciaux en ligne de mire des marchés

information fournie par Reuters •12/05/2025 à 08:20

(Actualise une dépêche publiée vendredi avec les discussions USA-Chine du week-end)

Les prochains jours pourraient être marqués par un nouvel apaisement des tensions sur les droits de douane si de nouveaux accords commerciaux sont conclus avec les États-Unis et ses principaux partenaires - en particulier la Chine - ou avec pessimisme si les données macroéconomiques s'avèrent décevantes.

Sur le front géopolitique, le président américain Donald Trump doit par ailleurs entamer une tournée stratégique au Moyen-Orient.

Tour d'horizon des perspectives de marché dans les jours à venir :

1 / RÉUNION CRUCIALE USA-CHINE

Le vice-Premier ministre chinois He Lifeng s'est entretenu ce week-end en Suisse avec le secrétaire américain au Trésor, Scott Bessent, et avec le représentant américain pour le Commerce, Jamieson Greer, une réunion qui s'est achevée sur une note positive, selon les deux parties, qui devraient publier une déclaration commune avec des précisions sur les avancées réalisées dans le courant de la journée lundi.

Des représentants américains ont pour l'instant signalé un "accord" destiné à réduire le déficit commercial des Etats-Unis avec la Chine, tandis que des représentants chinois ont rapporté qu'un "consensus important" a été trouvé.

Washington a imposé des droits de douane de 145% sur les produits en provenance de Chine. En réponse, Pékin a décidé de relever à 125% ses droits de douane sur les produits américains importés.

Les détails de ces discussions, le premier face-à-face entre les deux puissances mondiales depuis la naissance des tensions commerciale début avril, seront suivis de près par les marchés financiers, à l'affût de tout signe d'apaisement. Les récents espoirs d'une désescalade ont déjà profité aux actifs risqués - actions comme pétrole.

Il existe toutefois une grande incertitude quant aux annonces concrètes qui pourraient être faites lundi.

"Ce que nous semblons avoir ici, c'est un cadre général dans lequel les deux nations peuvent mener d'autres discussions, dans le but de parvenir à un accord commercial plus large", a déclaré Michael Brown, stratège principal chez Pepperstone.

"Ce n'est pas le pire résultat possible des négociations de ce week-end, loin de là, mais ce n'est pas non plus un accord concret", a-t-il ajouté. "Ces progrès permettent-ils de suspendre, de réduire ou d'annuler les droits de douane et, dans l'affirmative, pour combien de temps ?

2/ UN ACCORD QUI N'EST PAS UN MODÈLE

La Grande-Bretagne et les États-Unis ont annoncé jeudi le premier accord commercial depuis le début de la tourmente tarifaire déclenchée par l'administration de Donald Trump.

Le président américain et le Premier ministre britannique Keir Starmer ont qualifié de "révolutionnaire" l'accord en vertu duquel les droits de douane sur les livraisons britanniques de voitures, de moteurs et de pièces d'avion, ainsi que sur l'aluminium et l'acier, seront réduits ou supprimés en échange d'un meilleur accès au marché britannique pour le boeuf et les machines américains, entre autres dispositions.

Washington a toutefois maintenu des droits de douane de 10% sur tout le reste et le locataire de la Maison blanche a prévenu que cet accord n'était en aucun cas un modèle pour les négociations avec d'autres pays.

L'impact des droits de douane sur l'économie a créé une telle incertitude que les décideurs de la Banque d'Angleterre (BoE) ont été divisés jeudi sur la politique monétaire à suivre.

Les données à venir sur l'emploi et la croissance au Royaume-Uni devraient être plus que jamais dans le viseur des investisseurs.

3 / L'EFFET DES SURTAXES

La semaine sera aussi riche en indicateurs macroéconomiques en provenance des États-Unis alors qu'investisseurs et responsables politiques cherchent toujours à comprendre l'impact des droits de douane imposés par Donald Trump sur la croissance et les prix.

L'indice des prix à la consommation du mois d'avril, prévu mardi, fournira une nouvelle lecture des tendances de l'inflation, tandis que les chiffres des ventes au détail d'avril, qui seront publiées jeudi, donneront les dernières informations sur la santé des dépenses de consommation.

Dans le sillage des décisions douanières de Washington, les ventes au détail ont connu leur plus forte progression depuis plus de deux ans en mars, les ménages ayant augmenté leurs achats de voitures et d'autres biens pour éviter les hausses de prix dues aux surtaxes.

Les investisseurs attendent notamment de voir si la faiblesse perçue dans les enquêtes de confiance et d'autres données se traduit par un ralentissement de l'activité économique.

La Réserve fédérale américaine (Fed) a maintenu ses taux d'intérêt mercredi dernier, tout en déclarant que les risques d'inflation et de chômage avaient augmenté.

Les résultats trimestriels des entreprises américaines se poursuivent également, y compris ceux du géant Walmart, qui constitueront une autre bonne occasion de mesurer la propension des consommateurs à dépenser.

4 / TRUMP AU MOYEN-ORIENT

Donald Trump entamera la semaine prochaine la première tournée diplomatique de son second mandat dans trois pays du Moyen-Orient, en commençant par l'Arabie saoudite, une visite qui s'accompagnera de conférences sur l'investissement, en plus des questions commerciales et de sécurité.

Donald Trump a déclaré en outre qu'il annoncerait bientôt si les États-Unis allaient assouplir les restrictions à l'exportation de puces électroniques vers certains pays du Golfe, tandis que l'Arabie saoudite a dit que des accords sur les mines et les minéraux seraient discutés.

L'énergie devrait également occuper une place importante, alors que selon certaines sources, Washington n'exigera plus de l'Arabie saoudite qu'elle normalise ses liens avec Israël comme condition préalable à l'avancement des négociations sur la coopération nucléaire civile, ce qui représenterait une concession majeure de la part des États-Unis.

Le voyage de Donald Trump ne devrait pas inclure d'escale en Israël, qui est pourtant un proche allié de Washington.

5 / LE RETOUR DES DEVISES ASIATIQUES

Après des années de mise à l'écart par le puissant dollar, les devises asiatiques font leur retour : la hausse sans précédent du dollar taïwanais (8% en deux jours) suggère que les flux de liquidités se déplace en masse vers l'Asie, ce qui a déjà attiré l'attention des banques centrales.

L'autorité monétaire de Hong Kong est intervenue pour maintenir l'ancrage de sa monnaie au dollar. Les investisseurs estiment également que la hausse fulgurante de la monnaie taïwanaise pourrait être le signe d'un accord visant à affaiblir le billet vert en échange de concessions commerciales, ce que dément le président de l'île.

L'idée que des pays puissent laisser leur devise se renforcer dans le cadre de négociations commerciales avec les États-Unis restera présente à l'esprit des investisseurs, alors que s'ouvrent les négociations tant attendues entre les États-Unis et la Chine.

Plus précisément, la délégation sud-coréenne à Washington a déclaré que son ministère des Finances et le Trésor américain tiendraient des discussions séparées sur la politique monétaire à la demande du secrétaire au Trésor Scott Bessent.

(Graphiques par Sumanta Sen et Rae Wee, compilé par Dhara Ranasinghe, version française Diana Mandia, édité par Blandine Hénault)